FNADE Actualités

n°144 - 14 Août 2018

REPERES

Table ronde : Accélérer l’utilisation de matières premières du recyclage

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Anne-Cécile BRAS : "Le 2 juillet, des industriels sont invités à prendre des engagements volontaires en faveur du recyclage des plastiques.

Actuellement, 6 % de la totalité des plastiques proposés sur le marché en France contiennent du plastique recyclé."

© FNADE
Les freins à l’incorporation du plastique recyclé

Marc-Antoine BELTHE, FNADE - Directeur commerce, valorisation et innovation, Veolia Recyclage et Valorisation des déchets :

La filière du recyclage est complexe à structurer. Le dispositif Eco-Emballages a permis de donner un coup d’accélérateur au recyclage des déchets ménagers tandis que le recyclage des déchets industriels a été amorcé sans coup de pouce.

La fermeture des frontières de la Chine est sans doute une opportunité à moyen terme pour développer la filière du recyclage des déchets plastiques ; à court terme, cela reste un choc. En effet, environ la moitié des déchets plastiques français était exportée vers la Chine.

Patrick O’QUIN, France Industrie– Président du groupe de travail « Economie circulaire » :

France Industrie relève quatre freins à la réincorporation de la matière recyclée :

- le coût élevé de la matière secondaire, plus chère que la matière primaire (du fait du prix du pétrole)

- la quantité insuffisante de matière disponible

- l’enjeu de la qualité de la matière : toutes les résines ne sont pas forcément recyclables à l’infini ; certaines matières d’emballage migrent…

- la réglementation : comment passer d’une réglementation verticale, qui se fonde sur le produit, à une réglementation plus horizontale basée sur la matière et favorisant l’économie circulaire (cette réflexion obligeant à revoir les statuts de « produit » et de « déchet ») ?

Marc MADEC, Fédération de la plasturgie et des composites– Directeur Développement durable :

La Fédération de la plasturgie et des composites mène un travail de pédagogie sur l’utilisation des matières recyclées auprès des industriels, acteurs pour lesquels les préjugés en matière de recyclage peuvent être légion.

Le Centre technique industriel Innovation-Plasturgie-Composites de la Fédération consacrera, dans les prochaines années, 30 % de son budget à des travaux en lien avec l’économie circulaire.

Nous avons travaillé avec le Ministère de l’environnement et la Direction générale des entreprises (DGE) sur les engagements volontaires dans quatre secteurs : l’automobile, l’emballage, le bâtiment et les équipements électriques et électroniques. 300 000 tonnes de MPR supplémentaire seront utilisées par ces industriels (aujourd’hui, la consommation de MPR est de l’ordre de 400 000 à 500 000 tonnes).

Prévoir des catalyseurs pour développer la filière

Michel VALACHE, 2ACR (Association Alliance chimie recyclage) - Président :

L’association 2ACR rassemble des industriels de la chimie d’une part, et de la plasturgie d’autre part, dans le monde du recyclage. 2ACR a publié deux études en partenariat avec les pouvoirs publics, sur la filière du recyclage du plastique :

- Dans l’étude Analyse de la chaîne de valeur du recyclage des plastiques en France : trois grands axes pour développer la filière, 2ACR préconise d’injecter 30 millions d’euros par an dans la filière pour augmenter de 50 % le tonnage recyclé en 5 ans. Un catalyseur pour assurer l’économie de la filière du plastique recyclé : tous les acteurs doivent y trouver leur compte.

- Dans l’étude Faisabilité de mécanismes de sécurisation du modèle économique des filières du recyclage : application aux plastiques et élastomères, 2ACR préconise d’inclure les externalités environnementales dans le prix de la matière, ceci via un système de certification : toute entreprise de la filière qui investirait pour faire économiser de l’énergie pourrait se prévaloir de certificats rémunérateurs.

Plastique recyclé dans l'automobile

Fabrice ABRAHAM, Renault – Expert recyclage et économie circulaire :

La première Twingo©, qui date de 1990, comportait déjà de la matière plastique recyclée. Dans l’un de nos derniers modèles de véhicules, 20 % du plastique utilisé est de la matière recyclée.

En 2017, 57 000 tonnes de plastiques recyclés ont été incorporées dans l’ensemble des véhicules du Groupe. Renault s’est engagé à augmenter de 50 % le tonnage de plastique recyclé utilisé dans sa production mondiale entre 2013 et 2022.

L’intégration de la matière recyclée dans la voiture pose des problèmes de couleur (le plastique recyclé est noir en général) et d’odeur. Sur le plan du prix, pour Renault, il n’est pas question d’acheter du plastique recyclé plus cher que du plastique vierge. Enfin, Renault a investi dans un réseau de démolisseurs en France pour récupérer des pièces de véhicules hors d’usage afin de les réintégrer dans de nouvelles voitures (en organisant des circuits courts).

Le recyclage chimique, en complément du recyclage mécanique

Thierry GAUTHIER, IFP Energies nouvelles – Ingénieur :

L’IFP Energies nouvelles recherche des solutions de recyclage des plastiques, le recyclage chimique présentant des intérêts différents du recyclage mécanique : la chimie permet de dépolymériser, de retirer les colorants, etc. Les deux types de recyclage sont complémentaires.

Le développement de procédés chimiques à petite échelle revient très cher en coûts de production. Aussi, le recyclage chimique requiert des gisements de résine assez conséquents.

Actuellement, les travaux sur le recyclage chimique se concentrent sur le poly téréphtalate d'éthylène (PET) ou sur les pneus.

L’écoconception, une idée en progression

Michel VALACHE :

L’écoconception ne signifie pas la même chose d’un acteur à l’autre (fabricant, ou régénérateur). La résistance au changement, à l’incorporation, persiste : il y a dix ans, j’ai proposé de la matière recyclée à un industriel fabriquant des produits ménagers. Le produit incorporant de la MPR est sorti sur le marché il y a douze mois…

Patrick O’QUIN :

Dans l’industrie cosmétique, nous avons créé la plateforme, SPICE* pour évaluer le cycle de vie total des emballages. Ce faisant, nous voulons nous entendre, entre entreprises, sur un vocabulaire commun et mettre à disposition des ressources aux PME pour travailler sur le packaging durable.

Fabrice ABRAHAM :

Les cahiers des charges « d’écoconception » de Renault dédiés au recyclage du polypropylène interdisent l’utilisation de certaines matières qui polluent les filières.

66 % du polypropylène recyclé en France est utilisé dans l’automobile : Renault est donc très vigilant quant à la composition de ce produit recyclé.

Marc-Antoine BELTHE :

Réfléchir à l’écoconception ne revient pas uniquement à étudier la fin de vie d’un produit mais également à sa conception (et notamment au taux d’incorporation de MPR).

* SPICE pour Sustainable Packaging Initiative for Cosmetics a été lancé en mai 2018 par L’Oréal et Quantis, pour encourager le développement du packaging écoresponsable. La plateforme compte une dizaine de membres, dont LVMH, Shiseido, Sisley, Chanel, Avon, Clarins Group, Coty, L’Occitane en Provence, la Cosmetic Valley et la FEBEA. Source : http://www.formesdeluxe.com/innovation/spice/